lundi 24 septembre 2012

It's my life and I do what I want /// Théâtre les Tanneurs


IT’S MY LIFE AND I DO WHAT I WANT  - THEATRE LES TANNEURS – 15/09/12
A voir jusqu’au 29/09/12. www.lestanneurs.be   02/512.17.84

Comment traversons nous l'Histoire ou comment l'Histoire nous traverse-t-elle ? Et les guerres du XXème, (principalement la deuxième) et leurs conséquences ne font-elles pas toujours écho ? Combien d'artistes, (comme Christian Boltanski, né en 1944), travaillent-ils avec pour motif/moteur la disparition, l'absence ?
Alors suivons les pas de Willem Kroon, artiste multilingue exploitant des formes diverses : peinture, performance, théâtre, installations…, emmené par Guy Dermul et Pierre Sartenaer, dans les pas de cet artiste né en 1944 dans un Rotterdam en ruines.
"It's my life and I do what I want  ou la brève histoire d’un artiste européen du XXème siècle" a quelques parentés avec la démarche de Walid Raad : le mode performatif avec la conférence et ses accents de vérité, les archives avec exhibition de documents, de reproductions, le fait de mêler le vrai et le faux et somme toute considérer l'Histoire selon le concept de Walter Benjamin (pour qui l'histoire est une énorme catastrophe). On peut également rapprocher ce spectacle de l’œuvre de Sebald, écrivain et essayiste allemand né en 1944.
Willem Kroon suit des cours dans une école d'art, écrit une première pièce de théâtre, rencontre une poète polonaise, s'installe avec elle en Pologne, là il y rencontre Grotowski. Willem poursuit son œuvre théâtrale et crée un spectacle sur la guerre 14-18 qui permet de comprendre en dix minutes (et non pas en quatre ans) l’absurdité et l’horreur de cette guerre. Ensuite, le couple s'installe en Italie, fréquente les principaux plasticiens de l'Arte Povera. Willem poursuit sa route en Angleterre, rencontre Beckett, se brouille avec lui. Part en France, y aurait  rencontré près de Nice, Louis Wolfson et aurait participé à la rédaction de «  le schizo et les langues » (édité chez Gallimard et préfacé par Deleuze), ... Willem renoue avec sa mère alors qu’elle se meurt d’un cancer, elle lui révèle le nom de son père : Kurt Gerson (cinéaste juif assassiné à Auschwitz et que les nazis forcèrent à réaliser un film de propagande sur le camp de Theresienstadt . On finit par perdre la trace de Willem mais peut-être selon une certaine logique, vit-il non loin de Sarajevo... ainsi se passe la vie de Willem Kroon, enfant de la Shoah, artiste multiforme, qui croise la route de Beckett, le grand auteur de l'après Shoah, de l'arte povera ( qui met au centre de sa démarche avant tout le geste de l'artiste plus que son oeuvre), de Grotowski pour qui le corps de l'acteur est le centre de la représentation. Et voilà pour la traversée du siècle à la suite d’un artiste à l’œuvre disparate  et éphémère et dont nous reste au moins une citation : être artiste équivaut à échouer.

Mêlant le vrai et le faux, créant un itinéraire imaginaire au fil du XXème siècle, Guy Dermul et Pierre Sartenaer, aidé par la scénographie de Marie Szersnovicz trace une histoire des arts, enfin de certains arts, de la seconde partie du XXème siècle, des arts après la shoah. ce qui forme un spectacle émouvant, pertinent et drôle.